Groupe de travail sur les violences envers les personnels

Le 20 mai 2010, se tenait la dernière réunion du groupe de travail sur les violences à l’encontre des personnels pénitentiaires.

Mais à ce jour, soit 7 semaines après la fin des travaux pourtant menés au pas de charge, le rapport et les préconisations du groupe ne sont toujours pas rendus publics alors qu’ils étaient déclarés urgents, il y a quelques mois ! Pourquoi cette attente ?

Installé par la Garde des Sceaux en décembre 2009 et présidé par le procureur général près la Cour d’Appel de Riom, Philippe Lemaire, ce groupe de travail était composé de personnalités qualifiées (psychologue, sociologue, directeurs…), pour la plupart personnels pénitentiaires et de représentants des organisations syndicales, dont le SNEPAP-FSU. Les travaux du groupe se sont organisés autour des thématiques suivantes : la définition et la comptabilisation des agressions, les causes de ce phénomène, l’analyse des agressions, la formation des agents, les outils de repérage et de prévention et les réponses de toute nature à y apporter. La structure du rapport rend compte de ces thématiques.

La dynamique de travail instaurée par ce groupe a montré combien l’échange, par le croisement des regards qu’il implique, est favorable à l’enrichissement des pratiques dans une institution où les personnels subissent trop souvent l’isolement et le cloisonnement professionnels. Sans entrer dans le détail des dix séances de travail, il s’agit ici de présenter les principaux points débattus et les propositions défendues par le SNEPAP-FSU.

Une nouvelle fois, le SNEPAP-FSU a dû rappeler la place des SPIP au sein de leur propre administration. Il a interpelé Madame la Ministre sur le déséquilibre de représentation du groupe quand il a pris connaissance de sa composition : aucun DIP ou DSPIP n’a été nommément désigné pour y participer. Le mouvement de 2008 n’aura donc pas été suffisant et il faut encore le rappeler : les personnels des services d’insertion et de probation, tout corps confondus, se trouvent au coeur des processus de prise en charge des personnes condamnées. Le SNEPAP-FSU a défendu l’importance de ces personnels dans la communication interne comme dans le lien avec le monde extérieur, en milieu carcéral. Il a souligné ainsi la nécessité d’impliquer systématiquement la hiérarchie des SPIP dans la vie de la détention. Le SNEPAP-FSU a, par ailleurs, demandé qu’une réflexion spécifique soit menée sur cette question en milieu ouvert. La réforme portant création des SPIP en 1999 ne s’est accompagnée d’aucune réflexion véritable sur l’accueil dans ces services. Il a également souligné l’évolution des peines et des possibilités d’aménagements impliquant des enquêtes de plus en plus fréquentes sur des sites éloignés des services, qui peuvent présenter des risques. Par ailleurs, les discussions ont mis en avant le faible nombre d’incidents au sein des antennes de milieu ouvert qui faisaient effectivement l’objet d’une remontée aux DI. Si force est de constater que les SPIP n’ont pas la « culture de l’incident », le risque y est toutefois souvent banalisé et malheureusement quelque fois considéré comme un simple « risque du métier ». Pourtant les incidents existent en milieu ouvert et doivent être pris en compte et traités par notre administration. Ces dernières années, si des efforts ont été faits pour améliorer les conditions d’hygiène et de sécurité matérielle dans ces locaux, ce travail doit être poursuivi et une réflexion sur l’accueil menée.

Le SNEPAP-FSU défend une approche dynamique de la sécurité. La prévention de la violence doit s’accompagner d’une réflexion pluridisciplinaire sur les pratiques professionnelles des différents acteurs, sachant que la qualité de l’intervention de la hiérarchie a également une grande importance. Lorsque la violence n’a pas pu être évitée, elle doit systématiquement donner lieu à une analyse des incidents par les professionnels, base indispensable d’une prévention future. Le rapport final reprend les propositions émises par le SNEPAP-FSU : « l’apprentissage de « savoirs-être » appropriés n’est pas aisé et la formation initiale ne peut seule y répondre. La création d’espaces de discussion et d’échange entre les personnels est de nature à faire baisser le niveau de tension ressenti dans le cadre professionnel. L’institutionnalisation de lieux de réflexion permet une analyse des pratiques professionnelles, notamment avec le soutien de psychologues dédiés à cet effet » (Rapport du Groupe de réflexion sur les violences, p.19).

Tout au long de ce travail, le SNEPAP-FSU a également souligné et défendu l’importance de développer de nouveaux rapports sociaux en détention afin de promouvoir une communication relationnelle de qualité. Pour le SNEPAP-FSU, la vision qui consiste à opposer la situation des personnes placées sous main de justice à celles des personnels pénitentiaires relève d’un discours archaïque et, plus grave pour ces mêmes personnels, totalement inefficace pour réduire les risques d’agressions. L’autorité ne s’impose pas d’elle-même, du seul fait de porter l’uniforme ou de se revendiquer personnel pénitentiaire voire membre de la « troisième force de sécurité publique », comme le disent et revendiquent certains. Elle s’acquière par l’étude et la pratique, elle est le reflet de la compétence démontrée par un agent nourrie par la réflexion sur sa posture professionnelle et le développement de ses qualités humaines en termes de savoir-faire et de savoir-être : écoute, disponibilité, compréhension, clarté, respect, transparence ( sur ce point on devrait porter une regard attentif au contenu des décrets d’application de la loi pénitentiaire traitant de la déontologie professionnelle qui sont d’une grande pauvreté).

Sur les droits des personnes détenues et l’organisation de leurs conditions de vie : le SNEPAP-FSU souhaite que soit mise en place la consultation des personnes détenues, dont le principe est posé par l’article 29 de la loi pénitentiaire. La consultation, limitée par la loi aux « activités », devra donc désormais porter sur le travail, la formation professionnelle, l’enseignement, les actions culturelles, socio-éducatives et physiques et les programmes de prévention de la récidive, si les projets de décrets d’application sont maintenus en l’état. Certains de nos voisins européens, notamment l’Espagne, ont déjà largement développé ces procédures de consultation telles que le préconise la règle 50 des RPE et sur un champ bien plus vaste que ne le prévoit la loi pénitentiaire française. La preuve est ainsi faite que l’instauration de ces comités de détenus permet de créer des espaces dits de « conflictualisation » qui ont pour effet mesurable de limiter les passages agressifs qu’ils soient verbaux ou physiques. Pour le SNEPAP-FSU, cet outil doit être développé en France car il est un outil d’éducation à la citoyenneté et de responsabilisation des personnes incarcérées. Loin des caricatures simplistes, c’est également pour leur efficacité reconnue en matière de prévention des violences que le SNEPAP-FSU défend l’instauration de tels dispositifs. Pour ces raisons, le SNEPAP-FSU considère que la réflexion doit dépasser le seul milieu fermé et être élargie au milieu ouvert ! En complément, le SNEPAP-FSU a défendu le développement d’un travail pluridisciplinaire, afin de développer la prise de parole et favoriser l’expression de la pluralité. Ces réflexions vont dans le sens des revendications du SNEPAP-FSU qui a toujours demandé que l’implication des personnels de surveillance dans l’organisation et le fonctionnement de la vie en détention soit développée.

Enfin, sur la formation des professionnels : Le SNEPAP-FSU a revendiqué un parcours de formation amélioré pour tous les personnels et plus spécialement pour les personnels de surveillance de manière à développer les échanges pluridisciplinaire et à enrichir leur pratique professionnelle. Il revendique un socle commun de la formation pour tous les corps de l’administration pénitentiaire. Le SNEPAP-FSU souhaite également que la durée de la formation des surveillants et des personnels administratifs soit allongée. Le SNEPAP-FSU exige le développement d’une politique de formation continue, innovante en matière de prévention des risques professionnels et de sécurité dans toutes ses dimensions, ainsi qu’une indispensable adaptation aux techniques nouvelles et aux tâches spécifiques.

En conclusion, le SNEPAP-FSU attend de l’administration que le rapport issu de ce groupe de travail ne reste pas lettre morte, et qu’il soit rapidement publié et diffusé aux personnels !

Des mesures concrètes issues des conclusions du rapport doivent être mises en place sans tarder !

Et peut-être même, soyons ambitieux, que la mise en oeuvre d’une nouvelle organisation de détention (conformément aux RPE, avec une consultation des personnes détenues) verra enfin le jour !

pdf_Tract_Groupe_de_travail_Violences
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