Comité Technique Ministériel du 10 avril 2017 : Déclaration liminaire

Depuis le 27 mars, à l’appel des organisations syndicales et des collectifs, les guyanais.es sont mobilisé.e.s et en grève générale, afin d’obtenir le même accès aux droits que tous les citoyens et citoyennes du pays : Éducation, Formation, Emploi, Santé, Communications, Culture, Justice… En effet, aujourd’hui, personne ne peut plus ignorer la situation d’urgence sociale dans laquelle se trouve ce département : 44% des familles sous le seuil de pauvreté, 1 jeune sur 2 au chômage, 10 000 jeunes non scolarisés, 70% de jeunes de moins de 25 ans sans diplôme…

La section FSU de Guyane et ses syndicats nationaux n’ont eu de cesse de dénoncer l’absence de politiques publiques ambitieuses à la hauteur des défis démographiques, éducatifs, géographiques, économiques, écologiques et sociaux. La FSU Justice demande la prise en compte des réalités locales et l’allocation de moyens et mesures spécifiques pour y faire face et ainsi améliorer l’ensemble des

services publics. Pour la PJJ, cela passe par la construction d’infrastructures éducatives (foyer et service d’insertion). Nos organisations en Guyane ont fait des propositions en ce sens et attendent des réponses claires du gouvernement ! L’administration pénitentiaire n’est pas épargnée : une surpopulation carcérale endémique à l’instar de l’ensemble des établissements pénitentiaires d’outre-mer, deux antennes SPIP qui couvrent un espace géographique trop grand, une antenne de Remire-Montjoly logée dans des pré-fabriqués dépourvus de sanitaires, d’eau courante et de bureaux d’entretiens, après l’effondrement du bâtiment au début de l’hiver 2015…

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Au niveau du Ministère de la Justice, au 1er mars 2017, alors que le candidat Hollande promettait en 2012 la fin du tout carcéral, un nouveau record de surpopulation a été atteint. Loin de valoriser une autre politique pénale privilégiant les alternatives à la détention, le Garde des Sceaux a annoncé la construction de 33 nouveaux établissements pénitentiaires. Pourtant, il est largement démontré que

l’augmentation du nombre de places de prison n’est jamais un remède à la surpopulation, mais qu’elle produit un appel d’air engendrant davantage d’incarcérations. Le Livre Blanc sur l’immobilier pénitentiaire rappelle à juste titre que le programme immobilier doit être accompagné d’une politique pénale ambitieuse. Pour la FSU Justice, seule cette voie permettra de lutter efficacement

contre la surpopulation carcérale. Les mineur.e.s ne sont pas épargné.e.s par ce phénomène. En effet, depuis le 1er octobre 2016, nous constatons un accroissement continu et significatif du nombre de mineur.e.s détenu.e.s (797 au 1er mars 2017). Dans certains établissements accueillant des mineur.e.s, le taux d’occupation est supérieur au nombre de cellules, remettant ainsi en cause le principe d‘encellulement individuel. De plus, le temps moyen de détention des mineur.e.s a augmenté : moins de peines courtes et davantage de peines longues (6 mois ou plus).

Des établissements plein, des incarcérations plus longues ne peuvent avoir que des effets néfastes pour les adolescent.e.s incarcéré.e.s. Ainsi, la violente agression de 6 surveillants à Fleury-Merogis jeudi par des mineurs est une des conséquence de cette politique pénale axée sur l’enfermement.

Non seulement 6 personnels ont été blessés dans le cadre de leurs fonctions, mais les adolescents mis en cause vont voir leur situation pénale encore aggravée.

Ce gouvernement n’a pas voulu se démarquer de ses prédécesseurs en ne réformant pas l’ordonnance de 45, en ne réaffirmant pas la priorité de l’éducatif et la subsidiarité des peines, en n’abrogeant pas les dispositions régressives notamment les procédures rapides, en ne remettant pas en cause la logique sécuritaire de mise à l’écart.

Deux semaines avant les élections, dans ce domaine comme dans bien d‘autres, les propos populistes et démagogiques nous laissent peu d’espoirs de voir s’améliorer la situation des jeunes confronté.e.s à la justice pénale.

A la PJJ, le changement de Directrice, à quelques mois des échéances électorales, marque une phase d’attentisme. Pour notre part, nous continuerons d’interpeller la DPJJ sur les préoccupations des personnels et des conditions d’exercice des missions (normes de travail, déclinaison de la pluridisciplinarité…) dès que nous le jugerons nécessaire.

A l’administration pénitentiaire, la démission du Directeur ne fait qu’accentuer l’instabilité constatée depuis plusieurs mois. Difficile de ne pas s’inquiéter du devenir de certains dossiers en cours : travaux sur les référentiels des pratiques en SPIP, réforme statutaire de la filière insertion et probation…

D’un point de vue statutaire, la modification du statut des éducateur.trice.s et des ASS, adoptée le 3 mars 2017 au Conseil Supérieur de la Fonction Publique d’État, est largement insatisfaisante au regard de l’engagement pris par le gouvernement d’une intégration pleine et entière dans la grille des para-médicaux. De plus, il n’existe pas de garantie, notamment pour les agents en fin de carrière, de pouvoir bénéficier d’un reclassement digne de ce nom dans ce nouveau statut. Le projet du gouvernement est tout simplement un passage en catégorie « petit A » voire en « A minuscule » !

Enfin, il est désormais malheureusement devenu coutumier de conclure en rappelant que la FSU Justice attend toujours la création d’un corps de psychologues au Ministère de la Justice. Pas l’ombre d’une réunion de travail en vue, alors même que le Garde des Sceaux, en réponse aux propositions du Livre Blanc, rappelait sa volonté de voir aboutir ce dossier, ce qu’il avait déjà fait il y a 13 mois.

Paris, le 10 avril 2017

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