Comité Technique Ministériel du vendredi 6 novembre 2015 : Déclaration liminaire.

A l’occasion de cette rentrée, la question de l’emploi reste extrêmement préoccupante et le climat social continue de se dégrader. Les annonces de plans sociaux, de suppression de postes se multiplient. Pourtant, le premier ministre, loin de prendre en compte cette situation, a annoncé une refonte du code du travail, avec en premier lieu, la remise en cause de l’organisation du temps de travail. Sous couvert de rendre les textes plus lisibles, c’est un affaiblissements des droits et des protections des salarié-e-s qui est recherché.

Dans ce contexte de politique libérale, la fonction publique ne sera absolument pas préservée. La parodie de consultation relative à l’accord « PPCR » et la tentative de passage en force qui s’en est suivie interrogent au regard de la stupéfiante disproportion dans le traitement policier réservé à des manifestants d’Air France, à la

répression de la mobilisation des avocats dont les robes noires déchirées pèsent visiblement moins lourd qu’une chemise arrachée et la mobilisation des personnels de surveillance pour de meilleures conditions de travail. L’actualité suit son court avec cette même question : quelle valeur le gouvernement donne t-il réellement à la consultation des représentants des personnels ?

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A la PJJ, les éducateurs sont toujours dans l’attente de leur intégration dans le NES. Depuis de nombreuses années, ce corps majoritaire de la PJJ se trouve dans une impasse statutaire et ne se voit offrir comme seule perspective qu’un réaménagement de grille indiciaire sans répondre à la revendication tant de fois promise d’une intégration dans la catégorie A. Concernant la situation des Responsables d’Unité Éducative, la mise en place du grade fonctionnel se voit différée car ne faisant pas partie des priorités de la Fonction Publique « dixit la DPJJ », cela illustre le peu de cas fait de la situation de ces personnels. La FSU a saisie directement la Ministre de la Fonction Publique pour exiger la mise en place de ce projet, première étape vers notre exigence de l’intégration des RUEs dans le corps des directeurs.

La FSU tient de nouveau à demander à la ministre de la Justice de porter politiquement la nécessaire transformation des centres éducatifs fermés en foyers éducatifs et la réorientation des moyens. En effet, pendant l’été, une de ces structures a fermé suite à des violences d’adultes sur des adolescents. Le contrôleur

général des lieux privatifs de liberté a souligné, une nouvelle fois, « la difficulté à concilier la sécurité des personnes avec le respect des droits fondamentaux des mineurs ». Nous affirmons que les incidents en centres fermés sont une conséquence de la restriction de liberté et des injonctions de surveillance constante faites aux personnels.

Concernant l’ordre du jour, le point d’information sur les ANT ramené en fin de CTM, est sans aucun document associé. Cela traduit la place accordée par ce ministère aux agents contractuels. A l’occasion d’une journée d’action pour les agents non titulaires, des délégations de la FSU ont été reçues par des ministères et

des groupes politiques du Sénat et de l’Assemblée nationale. Au ministère de la Justice, nous avons été entendus une semaine plus tard, un vendredi soir, suite à une demande insistante. Auparavant, c’est au Ministère de la Fonction Publique, et plus précisément auprès de Madame la Directrice de cabinet de Madame LEBRANCHU, que nous sommes allés porter les revendications des agents non titulaires du ministère de la Justice. Et tout particulièrement celles tenant à la création d’un corps de psychologues d’une part et d’autre part l’absence de modalités de gestion équitable et transparente en matière de recrutement, de renouvellement de contrat et de rémunération pour l’ensemble des contractuels. Les lenteurs de ce dossier

laissent sans voix la DGAFP, pourtant au fait de cette question.

Concernant les psychologues, nous interrogeons fortement cette nouvelle interruption des travaux engagés en juillet 2015, après une première interruption de 12 mois. Comment expliquer qu’un calendrier et une méthodologie de travail, inscrits dans un agenda social, validé par le Comité technique ministériel après des semaines d’attente, soit remis en cause, au risque de renvoyer aux calendes grecques un projet de décret qui avait déjà commencé à être discuté ? L’administration doit sortir du silence.

Les déclarations intempestives qui ont été entendues à la suite du drame qui a touché les forces de l’ordre à l’occasion de l’interpellation d’une personne détenue en état d’évasion sont préoccupantes. Au premier plan celles de membres du gouvernement et dans une moindre mesure, celles des représentants d’organisations

professionnelles. Ces dernières déclarations, que nous mettons sur le compte de l’émotion et d’une méconnaissance structurelle, nous renforcent dans l’idée qu’il faudra bien finir par faire reculer ces conceptions si nous ne voulons pas voir la chaîne pénale se rompre. Des permissions de sortir à n’accorder que pour « nécessité avérée », comme si les décisions prises l’étaient pour le bon plaisir, aux « décisions de justice incohérentes et inacceptables », en passant par un avis favorable à la présence des forces de l’ordre en commission de l’application des peines, ce Gouvernement renoue avec une tradition qui s’était dissipée : faire déclaration au lieu d’invoquer la raison, distiller la démagogie à défaut de pédagogie.

Dans les services pénitentiaires d’insertion et de probation, ce débat sur les permissions de sortir, et plus généralement sur le sens de l’exécution des peines, passe particulièrement mal. Si, une fois n’est pas coutume, les médias ont tenté de faire une place aux personnels d’insertion et de probation et aux enjeux de leurs missions, l’exercice fût pour le moins peu maîtrisé par les représentants de l’État. Certes, et c’est historique, les organisations professionnelles de l’administration pénitentiaire ont été reçues par le Président de la République, la FSU ayant pu porter la voix des personnels des SPIP, mais c’est sans grande surprise que les questions sécuritaires ont monopolisé les échanges et les prises de position, toujours sans

grande imagination. Plus inquiétante encore est la profonde méconnaissance du SPIP et de ses missions, au sommet de l’État comme au sein de l’administration pénitentiaire : entre confusion de l’administration pénitentiaire et de la Protection Judiciaire de la Jeunesse, et nécessité de prévoir que l’administration pénitentiaire soit entendue en Commission d’Application des Peines, comme si elle ne l’était pas déjà depuis des décennies avec les représentants du SPIP, les directeurs d’établissements et les personnels en tenue souvent représentés par des officiers…

Il y a les missions, et il y a la reconnaissance de ceux qui les portent. De ce côté, des mesures catégorielles sont envisagées, ou annoncées de ci, de là. Des statuts dont la peinture est à peine fraîche sont annoncés comme susceptibles d’évoluer. C’est une bonne chose ; toute avancée est, dans ce domaine, à saluer. Mais encore faut-il ne pas laisser les autres, toujours les mêmes, au bord du chemin. La filière insertion et probation, qui réclame une reconnaissance statutaire en rapport avec les responsabilités qui lui incombent, n’a pas l’intention de regarder les trains défiler. Le corps des directeurs pénitentiaires d’insertion et de probation est le seul corps particulier de l’administration pénitentiaire sous statut spécial à être soumis à une catégorie A type, l’évolution de carrière est désormais dans une impasse, et l’écart d’avec le statut des Directeurs des Services Pénitentiaires est devenu insupportable. Pour les conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation, le passage à la catégorie A est, compte tenu de l’évolution des missions et des responsabilités, une absolue nécessité.

Paris, le 6 novembre 2015

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