Les personnels d’insertion et de probation leur disent merci !

Le 8 juillet, les personnels des SPIP et bien d’autres professionnels de l’administration pénitentiaire se sont unis pour dénoncer les dispositions sénatoriales visant à confier l’exécution des peines de probation à des « personnes morales habilitées ». Les organisations professionnelles représentatives de ces personnels ont su, comme à chaque fois que les

fondamentaux sont menacés, dépasser les clivages. L’unité syndicale reste pourtant un concept nébuleux pour certains.

Ainsi, c’est en pleine mobilisation des personnels que l’UFAP-UNSA, rarement aussi intéressée par les problématiques d’insertion et de probation qu’à l’approche d’élections professionnelles, a décidé de se rappeler à son bon souvenir en publiant un tract tragi-comique. Qualifiant l’action des personnels mobilisés de « faux semblant de surface », (Les personnels d’insertion et de probation s’excusent de ne pas goûter aux joyeux, mais polluants, autodafés de pneus)fustigeant leurs organisations professionnelles qui « plébiscitent depuis toujours la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 », accusant des « syndicats devenus volontairement amnésiques » de simuler révolte et indignation, l’UFAP-UNSA en a profité pour rendre, une fois de plus, la loi pénitentiaire coupable de tous les maux.

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A défaut de respecter l’engagement des personnels et de leurs organisations représentatives, la 1ère organisation syndicale, comme elle se définit, aurait pu s’offrir un peu de dignité en usant d’un droit qu’elle s’octroie trop rarement : celui de faire silence ou de ne parler que de ce qu’elle maîtrise…

La 1ère organisation syndicale nous indique avoir obtenu, « par une pression exercée auprès des interlocuteurs parlementaires et gouvernementaux », que le Parlement ne retienne pas les dispositions dénoncées. L’information est à peu près aussi crédible que celle qui verrait le SNEPAP-FSU annoncer l’obtention d’une renégociation du pacte européen de stabilité et de croissance auprès de l’Union européenne, mais c’est l’intention qui compte.

Alors tous ensemble remercions comme il se doit l’UFAP-UNSA, 1ère organisation syndicale, pour son action déterminante dans la réflexion et les débats qui ont entouré la préparation du projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l’individualisation des peines, ainsi que son implication globale et historique pour la cause des SPIP.

MERCI l’UFAP-UNSA, 1ère ORGANISATION SYNDICALE

(194 voix sur près de 4 000 personnels dans les SPIP en 2011, 92 voix sur près de 3400 personnels de la filière insertion et probation)

Absolument invisible au cours des nombreuses auditions parlementaires et ministérielles sur la préparation du projet de loi pénale : se référer à la liste des organisations entendues aux pages 533 et suivantes du rapport de la commission des lois de l’Assemblée nationale, aux pages 233 et suivantes du rapport de la commission des

lois du Sénat.

Aucune contribution écrite sur le sujet, à part une tentative si malheureuse que nous préférerions en rester au qualificatif

« aucune ». En septembre 2013, l’UFAP-UNSA était à l’origine d’un article délirant du Point.fr, lequel reprenait mot pour mot le titre et le contenu d’un écrit que cette organisation allait publier dans sa revenue interne en octobre. Après l’avoir qualifiée de disposition « la plus polémique », l’article (qui se contentait de donner force de loi à une disposition déjà portée dans le code de procédure pénale, incitant les collectivités locales et l’ensemble des acteurs engagés dans le suivi des personnes condamnées à favoriser l’accès de ces dernières aux dispositifs de droit commun) la transformait en « l’obligation d’octroyer aux délinquants passés par la case justice des aides sociales comme le RSA ainsi que des coups de pouce à l’emploi et au logement »…comme si les délinquants passés par ladite case étaient des sous-citoyens privés des droits élémentaires… Nous passerons sur l’interprétation juridique stupéfiante des conséquences de la suppression de l’automaticité des révocations de sursis (certes, nous

avons constaté la difficile maîtrise du terme « automaticité » par certains dans le cadre du dossier des fouilles).

Une contribution riche et active dans le cadre de la réflexion engagée à travers la conférence de consensus sur la prévention de la récidive, qualifiée de « vaste fumisterie où l’on pratique l’onanisme intellectuel justicière ». (L’onanisme désigne les pratiques individuelles de masturbation, référence biblique.) Cette initiative peut se voir taxer de toutes les tares, sauf celle d’avoir tenté de rassembler tous les acteurs

autour d’une table pour discuter de ce qui marche ou non en terme de prévention de la récidive…Nous comprenons néanmoins que certains soient déstabilisés par le fait que nous parlions, une fois en 50 ans, d’autre chose que de la prison, et que des personnes condamnées soient qualifiées autrement que par le terme de « représentants de la

voyoucratie ».

Une connaissance fine des SPIP, de leurs missions et des personnels qui officient en leur sein :

L’UFAP-UNSA est dotée d’une véritable vision pour les SPIP, qu’elle a souhaité, en plein débats sur la réforme statutaire de la filière, voir

« dotés de compétences spécifiques en matière socio-culturelle, principalement dans les établissements pénitentiaires. Tout ce qui a trait à l’action sociale en milieu fermé sert de soupape de sécurité aux personnels en contact avec la population pénale. » Voilà effectivement le rôle et la mission des personnels pénitentiaires d’insertion et de probation, pompiers de service, abordés uniquement sous l’angle de la sacro-sainte prison. Animer des ateliers macramé, répondre aux desiderata pour assurer la sécurité des vrais personnels

pénitentiaires. Après les règles pénitentiaires européennes, les règles européennes de la probation vont donner de sérieux maux de têtes à nos camarades ufapiens.

Il leur arrive toutefois de nous gratifier d’éclairs de lucidité, certes décalés, lorsqu’ils expliquent à l’administration qu’il faudra tout de même un jour que les « éducateurs » travaillent sur le passage à l’acte avec les détenus…

Une expertise et une attention toute particulière pour les problématiques des SPIP.

L’UFAP-UNSA a mis tout son poids dans la balance pour faire disparaître l’ancien Comité technique spécial dédié aux SPIP. Un recours déposé par ses soins devant le Conseil d’Etat avait d’ailleurs échoué, la haute juridiction reconnaissant l’intérêt de cette instance spécifique de dialogue social. La grande proximité entre l’UFAP-UNSA et

l’administration avait conduit cette dernière à la suppression de l’ancien CTPSE, en pleine mobilisation des SPIP traumatisés par l’affaire dite de « Pornic » en 2011.

Le SNEPAP-FSU a longtemps bataillé avant que la nouvelle Garde des Sceaux ne décide de rétablir cette instance à compter des prochaines élections. En conséquence, le Comité technique de l’Administration

Pénitentiaire (CTAP), seule instance nationale, est logiquement absorbée par la gestion des établissements et les questions intéressant les organisations professionnelles de surveillants, corps numériquement le plus important.

Les problématiques SPIP sont examinées à la marge, voire de manière catastrophique. Alors ici aussi, remercions l’action de l’UFAP-UNSA , à l’influence sans limite, pour tous les dossiers magnifiquement traités au cours des dernières années : les organigrammes SPIP, la préaffectation, la formation des personnels d’insertion et de probation etc.

Merci d’avoir laissé pourrir le dossier Origine / organisation du temps de travail assez longtemps pour avoir finalement, aux côtés des autres organisations du CTAP, adoubé l’usine à gaz inventée par l’administration. Merci d’avoir cautionné le recul des droits des personnels d’insertion et de probation (paralysie des horaires variables, violation du droit en autorisant l’administration à se servir dans les congés annuels d’un agent qui aurait anticipé la pause d’une journée de récupération de crédit temps, sans avoir effectué les heures nécessaires à la fin du mois, alors même qu’un décret parle de crédit et débit temps de 12 heures….)

Décidément, il est bien temps que le Comité technique SPIP reprenne du service…

Merci, enfin, pour n’avoir jamais levé le petit doigt, lorsque les organisations professionnelles représentatives de la filière se battent dans la rue ou dans toutes les audiences possibles et imaginables, pour des moyens humains et matériels, ne se contentant pas de quelques lignes dans un tract semestriel.

Le SNEPAP-FSU s’est engagé depuis plus de 10 ans pour que les missions de probation soient reconnues comme régaliennes. Les nombreuses contributions écrites dans le cadre des lois de 2004,

2006, de la loi pénitentiaire de 2009 ou du projet de loi en cours d’examen, comme toutes nos communications valent mieux qu’un affichage de façade. Nous n’avons de leçon à recevoir de personne.

C’est parce que cette société est cannibalisée par la seule question carcérale que les débats sur la probation ont des décennies de retard et que les dispositions dénoncées ont pu faire leur lit. C’est parce que certains n’ont jamais associé la question des moyens aux questions de fond que le Parlement a cru bon de recourir aux « personnes morales habilitées ». L’expression syndicale est un droit sacré ; le respect des organisations professionnelles et de l’ensemble des personnels est un devoir.

Paris, le 17 juillet 2014

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