Les SPIP à la croisée des chemins

Le 1er janvier 2013, le nombre de personnes placées sous main de justice a atteint le chiffre record de 251 958, soit une augmentation de 13 000 personnes en deux ans. Pourtant, face à plus de 10 années de croissance

continue, l’administration navigue à vue et ne cesse de reporter les recrutements pluridisciplinaires indispensables pour les SPIP. Et pour cause, près de 14 ans après leur création, elle n’a toujours pas doté ces services d’organigrammes qui lui permettraient pourtant d’ajuster les recrutements en fonction de la charge de travail !

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Les SPIP à la croisée des chemins
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Depuis deux ans, la pluridisciplinarité tant attendue se met donc en place de manière chaotique et timorée, sans évaluation chiffrée, sans réflexion de fond sur le rôle de chacun. Dans les SPIP, seulement 130 personnels pénitentiaires d’insertion et de probation supplémentaires pour faire face à cette augmentation et des personnels administratifs à l’agonie car tout autant touchés par l’accroissement exponentiel de leurs missions.

En outre, le déploiement des personnels de surveillance s’est fait de manière totalement désordonnée, entraînant des inégalités entre les sites et dans les fonctions. Parallèlement, le recrutement de psychologues a déjà pris du retard ; là encore, la précarité et la diversité du contenu des contrats, conjuguées à l’élaboration hasardeuse des fiches de poste, nous promettent des lendemains difficiles. Les cadres des SPIP, pour leur part, se sont retrouvés isolés, placés « entre le marteau et l’enclume », souvent dépassés par la souffrance des personnels pour lesquels ils représentent fréquemment l’instance décisionnaire la plus visible, aux prises avec des politiques et des décisions contradictoires, lâchés par une administration centrale qui ne leur a jamais fixé de cap.

Depuis deux ans, les SPIP ont aussi été confrontés aux choix politiques apportés en réponse à une crise économique devenue le nouveau signe de ponctuation des décideurs… Et tandis que les budgets de fonctionnement et d’insertion faisaient l’objet de coupes sèches, tandis que chacun observait le non renouvellement, ou la rupture au mépris de toute considération d’humanité, du contrat de personnels non titulaires, les personnels des SPIP prenaient acte, ébahis, de décisions et de communications désastreuses

opérées au gré de l’actualité (plan de sécurisation des établissements pénitentiaires) et des mouvements corporatistes.

Les SPIP sont aujourd’hui au bord de la cessation de paiement !

Si, au fil des mois, la reconnaissance des SPIP chemine, centimètre par centimètre, elle ne cesse toutefois de se heurter aux forces du passé : reconnaissance, à la marge, des acteurs de l’insertion et de la probation dans

l’organigramme pénitentiaire, postes de formateurs non proposés aux CPIP, refus symbolique du DAP de présider les CAP des personnels des SPIP, alors qu’il le fait pour les autres corps, tentatives à peine voilées de certains corps pour faire main basse sur les SPIP, comme si la réforme de 1999 n’avait jamais eu lieu. Les SPIP sont certes des services jeunes et fragilisés par un manque de reconnaissance face aux établissements et aux juridictions, mais plus que jamais il appartient à leurs personnels de réaffirmer le bien-fondé et la pertinence de leur création et de réclamer les moyens d’exister.

Le refus, jusqu’ici, de rétablir un comité technique spécifique demeure symbolique d’une lutte pour la reconnaissance qu’il reste à mener tant cette absence offre en pâture aux contingences et aux soubresauts de la détention, le quotidien et l’avenir des seuls services amenés à suivre l’ensemble des personnes placées sous main de justice… La gestion des ressources humaines est toujours aussi catastrophique, à l’image de

l’enterrement du dispositif de CPIP placés et de l’organisation ahurissante de la dernière CAP des CPIP.

Face à cette situation, armé de convictions et d’une vision rénovée de l’application des peines, le SNEPAP-FSU s’est attaché ces derniers mois à sensibiliser les acteurs de la politique pénale aux enjeux liés à une refonte du

processus pénal. A travers nos écrits, nous avons régulièrement eu l’occasion de dessiner les grandes lignes de nos revendications. Car le SNEPAP-FSU, malheureusement bien souvent seul, n’a jamais revendiqué des moyens pour des moyens !

De préparation de la conférence de consensus sur la prévention de la récidive en audiences avec la DAP, le Cabinet Ministériel, la Garde des Sceaux, Matignon, l’Élysée, nous avons tenté d’éclairer nos interlocuteurs. A

quelques semaines de la présentation du projet de loi pénale, nous voici à la croisée des chemins.

Au cours de ces nombreuses audiences, nos interlocuteurs ont été unanimes sur un point ; certains d’entre vous ont pu l’entendre de vive voix au cours de l’opération de communication organisée de concert par la chancellerie et la DAP le 14 juin dernier :

il n’y aura pas de moyens supplémentaires pour les SPIP.

Depuis deux ans, au-delà du discours, rien n’a changé. Et le temps est désormais venu de faire savoir que la conviction placée par les personnels des SPIP dans l’exercice de leurs missions et leur détermination à les défendre sont restées les mêmes.

Depuis quelques jours, et cela est suffisamment rare pour le signaler, une mobilisation des personnels d’encadrement des SPIP se construit. Le SNEPAP-FSU appelle les cadres, syndiqués ou non, déjà engagés dans cette mobilisation ou non, à participer aux réunions syndicales qui leur seront proposées dans les jours et semaines à venir à l’échelon inter-régional. D’ores et déjà, le SNEPAP-FSU multiplie les échanges et s’efforce de

soutenir la démarche engagée, de définir les conditions de sa poursuite et de sa réussite. La mèche allumée par les personnels d’encadrement ne doit pas s’éteindre… Mais pour le SNEPAP-FSU, au-delà des oppositions stériles

entre différentes catégories de personnels, il sera indispensable, dès la rentrée, que l’ensemble des personnels des services pénitentiaires d’insertion et de probation, tous corps confondus, puissent reprendre le flambeau.

LE SNEPAP-FSU POURSUIVRA SON TRAVAIL DE FOND, AU COURS DE L’ÉTÉ ET LORS DES DÉBATS PARLEMENTAIRES DÈS QU’ILS AURONT DÉBUTÉ, AFIN D’INFLUER SUR LE CONTENU D’UNE LOI PÉNALE QUI SE DOIT D’ÊTRE AMBITIEUSE.

MAIS, AVEC OU SANS LOI PÉNALE, LES PERSONNELS DES SPIP DOIVENT D’ORES ET DÉJÀ SE FAIRE ENTENDRE POUR OBTENIR LES MOYENS DE LEURS MISSIONS, D’UNE PROBATION DIGNE DE CE NOM.

AUSSI, LE SNEPAP-FSU S’EST PLACÉ DANS UNE DÉMARCHE UNITAIRE EN CONTACTANT LES ORGANISATIONS PROFESSIONNELLES REPRÉSENTATIVES DES SPIP AFIN D’ENVISAGER ENSEMBLE LA RENTRÉE.

DANS LES SEMAINES À VENIR, IL OEUVRERA AINSI À LA CONSTRUCTION D’UN MOUVEMENT MULTICATÉGORIEL ET UNITAIRE EN VUE D’INSTAURER

UN RAPPORT DE FORCE DURABLE ET FRUCTUEUX.

Paris, le 3 juillet 2013

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