Lettre ouverte au Garde des Sceaux : mise en conformité du CEL et de APPI

Objet : mise en légalité du logiciel APPI et du CEL

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Paris le 10 janvier 2011

M. Michel Mercier

Garde des Sceaux,

Ministre de la Justice et des Libertés,

Monsieur le Ministre,

Les services de l’administration pénitentiaire nous ont récemment annoncé leur intention de

présenter pour avis à la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL), dans le courant

du mois de janvier 2011, les décrets portant création du Cahier Electronique de Liaison.

Pour le SNEPAP-FSU, le caractère tardif avec lequel cette soumission à la CNIL intervient est

absolument incompréhensible, le logiciel en question étant mis en oeuvre dans les établissements

pénitentiaires depuis plusieurs mois déjà.

Alors même que se multiplient de manière anarchique, au sein de l’administration, des outils

informatiques ayant trait aux libertés individuelles – certains ayant été censurée par ladite commission, la

saisine de la CNIL ne peut être considérée comme une simple formalité.

Bien plus, la loi 78-17 du 6

janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés impose que les traitements

informatiques de données personnelles qui présentent des risques particuliers d’atteinte aux droits et aux

libertés soient, avant leur mise en oeuvre, soumis à l’autorisation de la CNIL. Nous considérons que le

Cahier Electronique de Liaison, par les informations personnelles qui y sont entrées, relève de ce risque.

Ainsi dans ce cas, l’article 26 de la loi du 6 janvier 1978 dispose :

I. – Sont autorisés par arrêté du ou des ministres compétents, pris après avis motivé et publié

de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, les traitements de données à

caractère personnel mis en oeuvre pour le compte de l’État et :

1° Qui intéressent la sûreté de l’État, la défense ou la sécurité publique ;

2° Ou qui ont pour objet la prévention, la recherche, la constatation ou la poursuite des

infractions pénales ou l’exécution des condamnations pénales ou des mesures de sûreté.

L’avis de la commission est publié avec l’arrêté autorisant le traitement.

Rappelons au passage que « le non-accomplissement des formalités auprès de la CNIL est sanctionné de

5 ans d’emprisonnement et 300 000€ d’amende » selon l’art. 226-16 du code pénal. Pour le SNEPAPFSU,

la loi impose bien une validation de tels fichiers avant leur mise en oeuvre et non après leur

déploiement dans les services, ce dont l’administration semble n’avoir pas tenu compte en l’état.

Par ailleurs, le SNEPAP FSU a été particulièrement surpris d’apprendre, en questionnant

l’administration, que le logiciel APPI n’a toujours par fait l’objet d’une déclaration par le Conseil d’Etat,

au motif que les décrets portant création de cet outil ne lui ont jamais été transmis, et donc soumis à la

CNIL.

S’agissant d’un logiciel utilisé depuis 2003 à l’Administration Pénitentiaire ainsi qu’aux Services

Judiciaires, la légèreté avec laquelle le Ministère de la Justice et des Libertés s’affranchit lui-même des

valeurs qu’il est censé garantir nous paraît scandaleuse.

Dans ce contexte, le SNEPAP-FSU estime relever de votre responsabilité la régularisation dans les plus

brefs délais du logiciel APPI comme du CEL.

En tant qu’organisation syndicale militant pour le respect des libertés individuelles, mais également pour

la sécurisation des pratiques professionnelles des personnels du Ministère de la Justice et des Libertés, le

SNEPAP-FSU estimera quant à lui relever de sa responsabilité, en cas d’absence d’une telle volonté

rapide, de s’interroger sur les conséquences juridiques auxquelles s’exposent les agents utilisant ces

logiciels non encore soumis à la CNIL.

Enfin, nous souhaiterions avoir connaissance de l’existence de l’ensemble des logiciels utilisés au

Ministère de la Justice et des Libertés, dont la législation vous impose une validation par la CNIL, ainsi

que les dates auxquelles cette commission a donné son accord pour utilisation.

Dans l’attente de votre réponse, ainsi que de la mise en oeuvre des obligations imposées par la loi sur ces

fichiers informatiques ci-dessus désignés, nous vous prions d’agréer nos sincères salutations,

Pour le SNEPAP FSU

Charlotte Cloarec

Secrétaire générale

NB : Nous vous informons que ce courrier sera rendu public

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