Notation évaluation : Retour à la case école ?
La nouvelle circulaire du 12 mars 2008 sur la notation évaluation des personnels de l’administration
pénitentiaire est mise en oeuvre actuellement dans les services. Les évaluations et notations ont
débuté, en effet, début juillet et doivent être transmises à l’administration centrale le 1er octobre au
plus tard. Elle concerne l’ensemble des personnels sauf ceux du corps d’encadrement et
d’application des personnels de surveillance.
Le cadre réglementaire reste le décret du 29 avril 2002, mais les modifications apportées sont
importantes, notamment :
La capitalisation de la note avec le temps disparaît. L’ancienneté n’est donc plus prise en compte.
Une note lettrée (de « E » comme excellent à « TI » comme très insuffisant) remplace la note
chiffrée. Contrairement à ce qui est en oeuvre dans le reste de la fonction publique, et parce que le
personnel pénitentiaire est sous statut spécial, la note n’est pas totalement supprimée.
L’appréciation est portée également sur l’évolution de la valeur professionnelle de l’agent : le
notateur devra en effet définir si celle-ci est « en progrès », « constante » ou « à améliorer ».
Les « items » pris en compte pour la notation sont modifiés.
L’évaluation prend une place plus importante. La circulaire consacre la mise en oeuvre concrète de
celle-ci qui est faite en fonction d’objectifs annuels individuellement fixés.
La durée maximale de la réduction de l’ancienneté dans l’échelon est augmentée, passant de 1 à 3
mois maximum.
L’impact de la notation sur l’indemnitaire est envisagé, même s’il est indiqué clairement
qu’actuellement, conformément à l’engagement du DAP, aucune modulation de l’IFPIP ne sera
mise en place.
La philosophie globale de cette circulaire est conforme à l’esprit des réformes de la notation dans la
fonction publique : individualisation des carrières et de la rémunération, et promotion du « mérite »
individuel ! Difficile donc de faire entendre notre forte opposition, notre critique semblant glisser
sans impact sur nos interlocuteurs !!!
Et pourtant…
Le SNEPAP-FSU estime qu’un entretien type « bilan annuel » peut être intéressant s’il constitue un
moment de dialogue et d’échange entre les membres d’une équipe et le responsable de celle-ci.
Mais se dégage de ce texte une conception extrêmement pyramidale et infantilisante de l’évaluation
et de la notation entre un « supérieur » et son « subordonné ». Outil de management basé sur le
mérite individuel, ce système, au lieu de motiver et de responsabiliser chaque membre de l’équipe
isole les personnels et risque d’entraîner une mise en concurrence contre productive ! Comme si
l’émulation ne pouvait être créée autrement !
Le dispositif de distribution de bons points (ancienneté dans l’échelon de 3 mois) est
particulièrement malsain car la circulaire précise que le nombre d’agents pouvant bénéficier d’une
réduction de 3 mois ne peut dépasser 20% du nombre total d’agents du corps ! Même si cette barre
des 20% sera examinée au niveau de la direction interrégionale, il ne fera nul doute qu’il sera
demandé aux notateurs d’apprécier la valeur professionnelle des agents en fonction de cette
considération mathématique et budgétaire… Ainsi, il sera difficile d’imaginer dans un même
service plus de 20% d’agents méritants. Ambiance, ambiance…
Etant donné les impacts sur la carrière et la rémunération, la notation évaluation devrait tendre vers
la plus grande objectivité possible. Or, cette réforme renforce la subjectivité. Les « items » sont
flous, difficiles à définir, et s’attachent davantage au « comportement » de l’agent, professionnel
voire personnel, qu’à son travail. Sont par exemple pris en compte notamment les « qualités et
aptitudes personnelles » et « qualités et capacités relationnelles », mais aucun item n’est en relation
avec les « usagers » du service public pénitentiaire. Le SNEPAP-FSU a demandé la suppression de
certains items éminemment subjectifs. On peut s’interroger par exemple sur la pertinence de la prise
en compte de la « sociabilité et du sens des relations » dans une évaluation professionnelle. De
même, on peut se demander comment sera évaluée la « puissance » de travail – qui sur notre
demande a été remplacé par une plus modeste « capacité » de travail…
Le risque de subjectivité de l’évaluation et de la notation, allié avec le manque de formation
des cadres sur cette question ne semble pas émouvoir notre administration. « Il existe des
recours », répond t-elle à nos critiques ! Soit…nous la prenons au mot et n’hésiterons pas à
inciter au recours, infime barrière contre les abus potentiels !
Paris, le 29 juillet 2008