Projet de loi exécution des peines : une autre politique pénale est donc possible
Le SNEPAP-FSU souhaite saluer le coup de force réalisé par le Sénat dans le cadre de la discussion sur le
projet de loi de programmation relative à l’exécution des peines votée mercredi 1er février.
La commission des lois, après avoir entendu les professionnels du monde judiciaire, dont le SNEPAP-FSU, a
ainsi estimé que le texte proposé par le gouvernement et voté par l’Assemblée Nationale le 17 janvier 2012
contredit l’esprit et la lettre de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009.
Le sénat a purement et simplement
révisé l’ensemble du texte issu de l’Assemblée Nationale, devenu « projet de loi de programmation relatif aux
moyens nécessaires à la mise en oeuvre de la loi 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire », pour
présenter un projet en adéquation avec sa propre vision de l’exécution des peines… force est de constater que
celle-ci est bien éloignée de celle du gouvernement !
En effet, les sénateurs suppriment dans ce texte la création des 30 000 nouvelles places de prison annoncées
par le Président de la République en septembre 2011 et se suffisent donc du programme immobilier
actuellement en cours (programme 13200) en y adjoignant 4 centres de semi-liberté ; ils créent un mécanisme
de numérus clausus permettant d’éviter la surpopulation carcérale en libérant automatiquement la personne
dont le reliquat de peine est le plus bas lorsqu’une autre personne condamné entre en détention ; ils
interdisent l’incarcération des peines d’emprisonnement inférieures à trois mois et ils abrogent les
dispositions relatives aux peines planchers. Enfin, ils suppriment la délégation des enquêtes pré-sententielles
aux associations.
Bien plus, le sénat a introduit des dispositions rappelant les avancées votées par la loi pénitentiaire et à ce
jour largement bafouées par le Ministère de la Justice et des Libertés et son bras-armé l’Administration
Pénitentiaire. Ainsi, tout comme le préconisait l’étude d’impact de la loi du 24 novembre 2009, les Services
Pénitentiaires d’Insertion et de Probation sont renforcés par le recrutement de 1000 conseillers
pénitentiaires d’insertion et de probation (CPIP) supplémentaires, afin de faire descendre le ratio de dossier
de ceux-ci de 88 à 60 par CPIP. Le Sénat programme également la dotation de nouveaux portiques de sécurité
dans les établissements pénitentiaires afin de rendre effective la suppression des fouilles intégrales des
personnes incarcérées, et alors que la DAP a contourné allègrement cette avancée dans l’écriture des décrets
d’application de la loi pénitentiaire.
Pour le SNEPAP-FSU, le Sénat a frappé un coup de point magistral sur la table de l’exécution des peines ! Ce
texte peut certes apparaître incomplet ou imprécis sur certains aspect comme par exemple sur la question du
partage des informations avec les établissements scolaires. Dans ce cas le Sénat permet la transmission du
jugement aux académies, mais uniquement dans les cas de condamnation à des crimes les plus graves afin de
préserver la présomption d’innocence, sans toutefois préserver l’intégralité du secret professionnel. Malgré
cela, le texte issu du Sénat s’illustre par des dispositions progressistes que le SNEPAP-FSU revendique parfois
de longue date.
Malgré les amendements successifs du gouvernement tendant à restaurer le texte initial lors de la discussion
en séance, les sénateurs n’ont pas fléchi. Bien sûr, le texte voté le 1er février au Sénat risque d’être soumis à la
censure de l’Assemblée Nationale, dont la majorité des membres voit son vote dicté par le gouvernement, car
celle-ci en matière d’urgence a le dernier mot. Certains diront alors que le Sénat n’a pas pris trop de risques,
mais pour le SNEPAP-FSU, ce coup de force est la preuve, si elle devait encore être démontrée, qu’une autre
politique pénale est possible, celle qui ne confondrait pas prison et punition, celle qui mettrait en
adéquation les objectifs et les moyens, celle qui ferait primer la prévention de la récidive sur l’enfermement
systématique.
Le SNEPAP-FSU appelle donc les députés à reconduire les dispositions votées par le Sénat !