Quels statuts pour quelles missions ?
La politique pénale actuelle a des conséquences concrètes sur les conditions de travail des personnels mais aussi sur le sens du travail quotidien. Le SPIP est plus que jamais le pompier qu’on alerte pour aménager les peines fermes qui, pour certaines, n’auraient sans doute pas dû être prononcées. Roi dans le royaume des aménagements, le PSE, est la soupape à activer pour éviter que la surpopulation pénale n’atteigne des records gênants. D’ailleurs, assisterait-on à une pareille pression ministérielle si le parc pénitentiaire était à niveau ? Rien n’est moins sûr !
La loi pénitentiaire à venir apportera peut être – on l’espère ! – des modifications substantielles aux droits des personnes détenues. Nous sommes pessimistes en revanche concernant la logique de l’enfermement qui ne sera pas, elle, bouleversée : quand la première autorité de l’Etat instrumentalise la cause des victimes, la plus grande des sévérités dans le prononcé des peines reste requise !!!
C’est dans ce contexte précis et pas vraiment favorable que les missions des SPIP sont en voie d’être précisées. Le choix de recentrer les missions sur la prévention de la récidive est vécu par certains comme un dévoiement de notre action au bénéfice de la répression en marche. Le SPIP serait le bras humain mais armé d’une justice inflexible. Alors, la notion de travailleur social pénitentiaire constituerait le rempart idéologique contre ce nouvel ordre sécuritaire.
Pour le SNEPAP FSU, si le combat contre la politique pénale populiste et démagogique est nécessaire, celui-ci ne doit pas interférer avec une nécessaire clarification des missions des SPIP.
Pour nous, le SPIP concourt à l’exécution et l’individualisation des peines dans un but de prévention de la récidive. L’intervention sur la situation socio – économique de la personne est souvent nécessaire pour créer un contexte de non récidive. Le champ d’action du SPIP dans ce domaine consiste, à travers l’accompagnement, à évaluer les besoins, à informer les personnes et à les orienter vers les acteurs de droit commun compétents. Les personnes condamnées ou prévenues doivent avoir accès aux prestations des services sociaux de droit commun (ex : conseil général, CCAS) de la même façon qu’une personne libre.
Les SPIP ne doivent en aucun cas se substituer et devenir des services sociaux spécifiques pour les personnes détenues ou condamnées en milieu ouvert sous peine de les stigmatiser toujours et encore et de les enfermer dans un statut de délinquant.
La raison d’être de l’intervention du SPIP se situe dans le fait qu’il existe une décision judiciaire. Le travail sur l’acte commis et sur ses causes est donc intrinsèque à la mise en place des mesures. Il implique une meilleure connaissance et une meilleure formation en criminologie, c’est-à-dire un savoir pluridisciplinaire (éléments de psychologie, de psychiatrie, de sociologie, de droit…) qui permet de mieux appréhender le phénomène criminel et délictuel et ses causes.
Pour toutes ces raisons, l’identité professionnelle des personnels des SPIP ne peut être celle de travailleurs sociaux au sens courant où on l’entend. Ce qui ne signifie pas que les personnels des SPIP doivent se limiter au contrôle du respect des obligations. En effet, il existe bien une spécificité du travail du SPIP entre ce qui ferait de nous un agent du JAP (contrôle du respect des obligations) et un travailleur social. Cette spécificité se situe dans la compréhension de l’acte de délinquance et l’accompagnement de la personne condamnée pour éviter une récidive. Enfin, le sens de l’écoute, l’absence de jugement moral, ne sont pas inhérents à l’identité de travailleur social mais relèvent d’une déontologie dont la codification serait une garantie.
Dans cette optique, les programmes de prévention de la récidive peuvent contribuer à apporter un plus à nos interventions et à enrichir certains suivis. Le SNEPAP FSU est donc favorable à leur expérimentation, à partir du moment, toutefois, où certaines précautions sont garanties :
la participation à un programme ne peut venir qu’après une évaluation individuelle. L’entretien individuel doit rester une des bases de notre pratique professionnelle.
L’intervention du SPIP doit rester sur un terrain criminologique et ne doit jamais glisser sur un aspect thérapeutique.
L’animation de groupes de paroles par des personnels d’insertion et de probation n’est envisageable que si ceux-ci ont reçu une formation adéquate.
Au stade de l’expérimentation, aucun service ni aucun personnel ne doit se voir imposer une telle pratique.
Cette expérimentation devra s’accompagner d’une évaluation sérieuse et contradictoire, discutée avec les organisations syndicales.
Enfin, une telle évolution demande de la réflexion, de la concertation. L’élaboration d’un projet ne peut se faire dans la précipitation !
Cette évolution des pratiques traduit une responsabilité accrue des SPIP et de ses personnels dans les processus décisionnels des modalités d’exécution des peines. Loin d’être assujettis à de simples tâches d’exécution, les personnels d’insertion et de probation développent une expertise au sens de savoir-faire en matière de prévention de la récidive.
Les missions telles que décrites, induisent une mise à niveau des statuts avec les responsabilités. L’administration pénitentiaire ne peut en effet, continuer de demander toujours plus, d’exiger des personnels évolution et adaptation, tout cela sur fond de surcharge de travail chronique, sans se pencher plus longtemps sur la valorisation du métier.
Pour le SNEPAP FSU, seul l’accès à la catégorie A est susceptible de répondre aux enjeux. Cet objectif, qui passe par la création d’un corps unique, est légitime et réalisable pour les raisons suivantes :
la catégorie A n’est pas forcément synonyme de fonctions d’encadrement de personnels (ex des professeurs des écoles). Elle peut être considérée comme une reconnaissance de certaines responsabilités.
la quasi-intégralité des personnels présente un niveau diplôme dépassant largement celui requis pour accéder à un statut CII.
le choix de nombreux titulaires formés de partir vers d’autres carrières plus valorisantes ne peut pas être apprécié seulement comme une saine fluidité au sein de la fonction publique. C’est le symptôme d’une inadéquation entre les exigences de ce travail et le niveau de rétribution.
Les missions des SPIP méritent clarification !!!
Ses personnels méritent un statut à la hauteur des responsabilités qu’on leur demande !!!
Oui aux responsabilités, mais l’évolution des statuts doit logiquement suivre !!!
le SNEPAP-FSU défendra avec force et conviction cette exigence plus que jamais d’actualité !!!