Courrier au DAP sur la question des ASS dans les SPIP
Paris, le 7 juillet 2010
Monsieur le Directeur,
Le Comité Technique Paritaire – Socio-Educatif du 21 juillet 2010 va marquer une évolution majeure pour
les services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP) et le statut des personnels qui composent cette filière.
Nous souhaitons néanmoins par ce courrier vous alerter une nouvelle fois sur une partie des membres de cette
filière qui pour autant ne connaîtront pas d’évolution statutaire directe : les personnels de service social (assistants,
assistants principaux et conseillers techniques de service social).
Depuis son congrès de 1982, le SNEPAP-FSU revendique dans un souci de clarté et d’équité, la création
d’un corps unique pour l’exercice des missions dévolues aux conseillers d’insertion et de probation (CIP). En effet,
les actuels assistants de service social (ASS) présents dans les SPIP, occupent exactement les mêmes fonctions que
les CIP. Pour autant, leur statut particulier et leur rémunération diffèrent. Ainsi, ne sont-ils pas soumis au statut
spécial. De même, leur régime indemnitaire spécifique entraîne, à échelon égal, une rémunération supérieure à celle
d’un CIP. A l’inverse, ces montants indemnitaires ne sont pas intégrés dans le calcul des droits à la retraite
contrairement à l’indemnité de sujétion spéciale pour les CIP. Bien plus, le SNEPAP-FSU défend une vision du
métier de CIP désormais distincte des professions traditionnelles du travail social. A cet égard, le SNEPAP-FSU
partage sans mal les orientations du protocole du 9 juillet 2009 et cela non seulement pour leurs conséquences
statutaires.
« Le nouveau corps des conseillers d’insertion et de probation constituera la réponse au constat d’évolution des
métiers qui se fonde sur la nécessité de distinguer les métiers et missions dévolues aux conseillers d’insertion et
de probation et aux assistants de services sociaux.
[…]
Ainsi, il convient de faire évoluer le corps des CIP en dehors de la filière des métiers sociaux et par la même de
mettre fin à son rattachement à la grille indiciaire des B CII, l’objectif étant de placer les deux grades sur des
grilles indiciaires correspondant à celles des grades de lieutenant et capitaine pénitentiaires. » (Protocole du 9
juillet 2009 – p. 4)
Néanmoins, cette évolution des statuts de CIP et de DIP, adossée à l’évolution des missions ainsi que la
mise en extinction du corps de CSIP vont placer les personnels de service social en situation d’opter pour une
orientation professionnelle. C’est pourquoi, au cours du comité de suivi du 1er avril 2010, le SNEPAP-FSU vous a
interrogé sur les intentions de l’administration pénitentiaire concernant les personnels de service social présents au
sein des SPIP. En réponse, vos services ont fait paraître le 2 avril un « mémo » concernant les aspects statutaires
qui stipule :
« – Droit d’option ouvert aux ASS détachés dans le corps des CIP pour leur intégration dans le nouveau corps de
PIP surindiciarisé : ces personnels qui exercent les missions dévolues au corps des CIP actuel, auront,
conformément au protocole, un droit d’option qu’ils exerceront au plus tard le jour précédent l’entrée en vigueur
du décret statutaire. Les ASS pourront opter :
=> pour un détachement d’une durée de 2 ans dans le nouveau corps des CPIP (ou pour une prolongation de leur
détachement pour la durée restant à courir sur la base de 2 ans) et, à l’issue de cette période, demander leur
intégration.
=> se recentrer sur des missions de travailleur social qu’ils pourront exercer au sein des SPIP ou à l’extérieur
de ceux-ci.
=> la situation des conseillers techniques de service social (CTSS) ferra l’objet d’un traitement spécifique. »
(Mémo SPIP n°13)
Pour le SNEPAP-FSU, ces premiers éléments sont largement insuffisants et dans tous les cas, ne sont pas
de nature à éclairer le choix des ASS et CTSS qui n’opteraient pas pour la voie du détachement puis de
l’intégration. Bien plus, ils demeurent en-deçà des annonces du protocole tant sur les évolutions statutaires que sur
l’aspect des missions :
« En ce qui concerne plus particulièrement les assistants sociaux qui aujourd’hui exercent les mêmes missions que
les CIP, deux options leur seront offertes :
soit ils préfèrent rester dans le champ du travail social et dans ce cas, les agents restent sur leur statut
d’assistant de service social. Les ASS détachés dans le corps des CIP, choisissant cette option, devront
mettre fin à leur détachement au plus tard le jour précédant l’entrée en vigueur du statut du nouveau
corps.
soit ils souhaitent s’orienter vers le travail d’insertion orienté sur le champ du pénal et de la criminologie
et dans ce cas, ils optent pour l’intégration dans le nouveau corps. Cette intégration nécessite, au
préalable, un détachement dans le corps des CIP, qui s’éteindra à l’issue de l’intégration des personnels
dans le nouveau corps soit le 31.12.2013.
Dans ce cas de figure, deux mouvements doivent être distingués :
o le passage de l’agent sous statut spécial et son corollaire qui est l’attribution de la PSS à hauteur
de 22 % de sa rémunération brute,
o à l’instar des collègues IP, le reclassement sur l’échelle du corps surindiciarisé ». (Protocole du 9
juillet 2009 – p. 4)
« L’administration pénitentiaire doit favoriser l’accès des personnes qui lui sont confiées à l’ensemble des
programmes sociaux dont peuvent bénéficier les citoyens. Les SPIP sont particulièrement chargés du
développement de cet accès. A terme, l’objectif poursuivi est l’intervention directe des dispositifs de droit commun,
à l’instar de ce qui est prévu dans le projet de loi pénitentiaire pour la formation professionnelle, ou de ce qui se
fait déjà avec l’éducation nationale pour l’enseignement. A cet effet, un partenariat structuré, notamment par le
biais de conventions, avec les services déconcentrés de l’Etat et les collectivités territoriales doit être
particulièrement soutenu. Cet accès direct est aujourd’hui encore difficile pour les personnes détenues. Aussi afin
de ne pas les priver de droits sociaux importants, les SPIP doivent être dotés, à titre transitoire, de travailleurs
sociaux articulant le lien avec les dispositifs locaux. Il sera fait un bilan de l’intervention des dispositifs de droit
commun après 2 ans d’application du présent protocole.
Les assistants de service social actuellement en fonction dans les SPIP pourront choisir leur orientation
professionnelle, ainsi qu’il a été indiqué supra ». (Protocole du 9 juillet 2009 – p. 6)
Pour le SNEPAP-FSU, la réforme à venir visant à « recentrer » les missions des SPIP sur
l’individualisation des peines et la prévention de la récidive ne pourra aboutir sans une volonté ferme de
l’administration pénitentiaire d’organiser le transfert des missions « sociales » assurées aujourd’hui par les SPIP
vers les services déconcentrés de l’Etat et les collectivités territoriales en charge des dispositifs de droit commun.
Pour les personnes sous main de justice, l’exercice des droits sociaux fondamentaux, contenus dans le Préambule
de la Constitution du 27 octobre 1946, doit impérativement être garanti. A défaut, l’évolution attendue et
souhaitable de l’intervention des SPIP, notamment au sein des établissements pénitentiaires, restera lettre morte.
Les personnels de service social qui feraient le choix de conserver leur statut, pourraient être un rouage essentiel de
cette transition mais aucun élément concret n’est avancé à ce jour, ni concernant les tâches qui seraient
pratiquement confiées à ces travailleurs sociaux, ni même concernant l’extension et la structuration du partenariat
institutionnel au plan national. Pourtant, la période d’évaluation de l’intervention des dispositifs de droits commun
fixée par le protocole est déjà pour moitié écoulée. A cet égard, les travaux préparatoires des décrets d’application
de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 ont renforcé nos inquiétudes. En effet, ils n’ont fait aucune allusion à
l’art. 9 selon lequel :
« Art.9 – L’Etat peut, à titre expérimental pour une durée maximale de trois ans à compter du 1er
janvier suivant la
publication de la présente loi, confier par convention aux régions ou à la collectivité territoriale de Corse, sur
leur demande, l’organisation et le financement des actions de formation professionnelle continue des personnes
détenues dans un établissement pénitentiaire situé sur leur territoire.
Six mois avant le terme de la période prévue au premier alinéa, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport
sur la mise en oeuvre de cette expérimentation. »
De même, les modalités de mise en oeuvre de l’art. 30 de la loi et tout particulièrement de son deuxième alinéa
demeurent inconnues notamment sur la question de l’intervention des Conseils Généraux en charge de la politique
d’action sociale définie à l’art. L121-1 du Code de l’Action Sociale et des Familles.
« Art. 30 – Les personnes détenues peuvent élire domicile auprès de l’établissement pénitentiaire :
1° Pour l’exercice de leurs droits civiques, lorsqu’elles ne disposent pas d’un domicile personnel. Avant chaque
scrutin, le chef d’établissement organise avec l’autorité administrative compétente une procédure destinée à
assurer l’exercice du vote par procuration ;
2° Pour prétendre au bénéfice des droits mentionnés à l’article L. 121-1 du code de l’action sociale et des
familles, lorsqu’elles ne disposent pas d’un domicile de secours au moment de leur incarcération ou ne peuvent
en justifier ;
3° Pour faciliter leurs démarches administratives. »
Monsieur le directeur, vous pouvez le constater de multiples questions demeurent aujourd’hui sans
réponse :
Quelles missions pour les travailleurs sociaux des futurs SPIP ? Quel statut ?
Quelle garantie pour les personnes détenues d’avoir l’interlocuteur compétent en matière de droits
sociaux à court et à plus long terme ?
Quels lieux d’affectation, dans la mesure où l’articulation avec les dispositifs de droits communs concerne
prioritairement les établissements pénitentiaires ?
Quelle gestion pour la mobilité qui pourrait donc découler de la réforme pour certains personnels de service
social ?
Quel calendrier ? Quelle échéance pour faire jouer le droit d’option ?
Quels impacts statutaires, indiciaires et indemnitaires ?
Quelle perspective pour la mise en oeuvre du « Nouvel Espace Statutaire » de la Catégorie B-CII pour les
ASS qui n’opteraient pas pour le statut de CPIP ?
Quel avenir pour la CAP de mobilité commune CIP-ASS ?
Pour autant, si le calendrier de la réforme statutaire de la filière insertion et probation est respecté, c’est dès le
quatrième trimestre 2010 que l’ensemble de ces points devra être éclairci. Nous ne pouvons plus attendre, il en
va de l’intérêt des services, des personnels et des usagers. Pour le SNEPAP-FSU, le Comité Technique
Paritaire – Socio-Educatif du 21 juillet 2010 doit être l’occasion d’ouvrir ces chantiers. C’est pourquoi nous
vous demandons officiellement d’ajouter ce point à l’ordre du jour.
PS : Ce courrier sera rendu public.
Pour le SNEPAP-FSU,
Sophie DESBRUYERES
Secrétaire Générale