« LE FAIT DU PRINCE »

Nous apprenons ce jour par voie de presse, que le Président de la République a décidé pour la première fois depuis son élection d’user de son droit de grâce à l’occasion des fêtes de fin d’année. Au-delà du soudain revirement du Président qui a toujours fait état de sa volonté de fermeté et de son hostilité à l’égard de ce type de mesures, le SNEPAP-FSU dénonce aujourd’hui tant la méthode que les critères adoptés pour sélectionner les détenus qui bénéficieront de ces grâces individuelles.

En effet, le Président de la République a adressé une lettre à la Garde des Sceaux qui a aussitôt saisi le DAP à ce sujet, afin d’établir une liste d’une cinquantaine de personnes détenues, « au mérite particulier » (secours porté à un co-détenu, intervention lors d’une tentative de suicide ou d’une agression, etc.). L’Elysée souhaite ainsi étudier ces différents dossiers dans le but de prononcer des grâces individuelles selon le mérite ! Pour le SNEPAP-FSU, qui a toujours dénoncé le système des grâces qu’elles soient collectives ou individuelles, un palier supplémentaire est franchi dans l’arbitraire et le subjectif avec cette nouvelle annonce…

Seront exclus par principe les condamnés criminels ou pour des « affaires de mœurs » et les récidivistes, le « mérite » n’existant sans doute pas pour ces catégories de détenus… Etrange façon d’encourager ces personnes dans leur réinsertion…



Sera limité à cinquante le nombre de personnes susceptibles de bénéficier de ces grâces… Quelle hasardeuse estimation a donc permis a priori de limiter le nombre de détenus méritants à une cinquantaine alors même que le nombre de personnes incarcérées n’a jamais été aussi important (66 712 personnes écrouées au 01/10/2008) ? Les plus de 66 000 exclus de ces mesures n’auront sans doute plus qu’à « espérer d’avoir la chance » de partager leur cellule avec une personne suicidaire ou d’être témoin d’une agression !!!

Après la recherche fiévreuse de boucs-émissaires parmi les personnels pénitentiaires et judiciaires à chaque fait divers ayant ému l’opinion publique, après les atteintes répétées à l’indépendance du pouvoir judiciaire, la Présidence de la République revient à présent à des pratiques d’un autre âge : des grâces individuelles sans autre critère que le bon vouloir de la plus haute autorité de l’Etat…

Ces vaines tentatives n’occulteront pas près de deux ans d’une politique pénale erratique, toujours plus répressive et guidée par l’émotion. Bien au contraire, ces pratiques monarchiques et arbitraires ne feront que rendre plus difficile encore la lourde tâche de faire exécuter des peines en leur donnant du sens, afin de prévenir les risques de récidive.

Le « culte du mérite individuel », véritable cache-misère qui prévaut aujourd’hui dans l’attribution inique des primes de fin de gestion, atteint désormais la population pénale. Pour les professionnels du monde judiciaire et pénitentiaire, c’est le coup de grâce !

Paris, le 28/11/2008

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