TEMPS DE TRAVAIL DES AGENTS DES SPIP : NOUVEAU HOLD-UP EN PREPARATION

Depuis mars 2012 et la mise en oeuvre d’Origine dans les SPIP, le SNEPAP-FSU n’a cessé de dénoncer le hold-up opéré sur le temps de travail des personnels qui y exercent. Interpellations des DAP successifs, sensibilisation des personnels par la diffusion d’un guide des droits horaires, mise en oeuvre de recours hiérarchiques et en excès de pouvoir ont conduit l’Administration Pénitentiaire à revoir sa position. Aujourd’hui même, au cours de la réunion du Comité Technique de l’Administration Pénitentiaire (CTAP), la DAP considérera, sauf coup de théâtre, qu’elle est sortie de l’impasse dans laquelle elle s’était enfermée, et ce avec la bénédiction des organisations professionnelles siégeant au CTAP, lesquelles se sont assez curieusement distribuées les lauriers de la victoire à coup de communications toutes aussi incompréhensibles que contradictoires.

Le SNEPAP-FSU a pourtant fait le compte des propositions de la DAP, quatre propositions à l’odeur alléchante qui, à défaut de nous sortir de l’impasse, nous conduiront droit dans un nouveau cul de sac.

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Les propositions de la DAP, préparées avec les organisations siégeant au CTAP, sont les suivantes :

* Possibilité pour un agent d’anticiper la prise d’une récupération de crédit-temps (RCT) : à titre d’exemple, il pourra poser une journée d’absence courant janvier, en anticipation d’un crédit-temps qui devra être réalisé au 31 de ce mois. A défaut, une journée de congé annuel sera ponctionnée.

* Élargissement du délai pour poser une récupération de crédit-temps constituée : une RCT générée en janvier devra être posée en février ou en mars, soit en N + 1 ou N+2.

* Possibilité pour un agent de cumuler deux journées de RCT sur un même mois : les journées de RCT relatives aux mois de février et de mars pourront être posées ensemble et de manière consécutive en avril.

* Création d’un crédit-temps trimestriel : une RCT trimestrielle (correspondant au trimestre civil) pourra être posée, si le crédit-temps est suffisant en fin de trimestre civil, en sus et sous la même condition (N+2) que pour la pose d’une RCT « mensuelle ». A titre d’exemple, les heures cumulées en janvier, février et mars, pourront être posées dans le cadre d’une RCT en avril et en mai.

Or, ces propositions, dont la mise en oeuvre pratique sera particulièrement complexe, rigide et opaque, entraîneront en premier lieu une charge de travail conséquente pour l’ensemble des agents en charge de la gestion d’Origine. Pire, elles consacreront de nets reculs de droits pour la majorité des personnels des SPIP.

Les horaires variables en berne….

En maintenant le principe de la RCT mensuelle et en la doublant d’une RCT trimestrielle, l’administration restreint cette fois le droit pour les personnels de récupérer le crédit-temps sur les plages mobiles. En effet, et à titre d’exemple, un crédit-temps de 4 heures en janvier conduira automatiquement à la création d’une RCT d’1/2 journée (3 heures 36) et d’un crédit-temps de 24 minutes (4 heures – 3 heures 36) pour les personnels d’insertion et de probation exerçant à temps plein. Ils n’auront aucune possibilité de récupérer sur les plages

mobiles ces 4 heures de crédit-temps. Pourtant, nombre de personnels souhaitent « jouer » sur ces plages mobiles, en adaptant leurs journées de travail à leurs contraintes personnelles. C’est la substance même du principe du régime des horaires variables qui est ici niée. Obsédée par la gestion de ce qu’elle considère comme des droits ouverts à récupération, la DAP a totalement perdu de vue la logique même de l’aménagement du temps de travail.

Vol de congés annuels et plafond de 12 heures à sens unique….

La mise en oeuvre d’une RCT anticipée ouvre la possibilité pour l’administration d’organiser des saisies sur les congés annuels des agents alors même que ces derniers disposeraient sur leur compteur Origine du crédit-temps suffisant à compenser la RCT anticipée ! Ainsi, un agent ayant généré 2 heures de crédit-temps en février, posant une journée de RCT anticipée en mars, mois de mars où il aurait généré 6 heures de crédit-temps, se verrait « saisir » une journée de congé annuel (car, au 31 mars, il lui manquerait 1 heure 12 fin pour atteindre les 7 heures 12), alors même que le compteur crédit-temps global serait positif à + 8 heures !…

Il convient de rappeler que le temps de travail des personnels de l’Administration Pénitentiaire est régi par la circulaire ARTT du 27 décembre 2001, qui précise que « le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d’une durée annuelle de travail ». En outre, elle prévoit la possibilité, pour certains services ou unités de service,

de travailler en « horaires variables » avec mise en place d’un dispositif de crédit / débit temps limité à 12 heures en application des dispositions générales de la Fonction Publique. Les textes prévoient donc un système de débit / crédit temps avec plafond à 12 heures, tant dans le positif que dans le négatif.En ponctionnant une journée de congé annuel suite à la pose d’une RCT anticipée avec balance négative d’heures en fin de mois, l’administration et les organisations professionnelles, plutôt pressées de solder un dossier qu’elles ne maîtrisent visiblement pas, font fi de la possibilité actuelle d’un agent de se trouver en débit-temps plafonné à – 12 heures.

Et toujours pas de véritable cumul du crédit-temps…

Les propositions soumises aujourd’hui au CTAP conduisent à entériner l’interprétation de la DAP de la circulaire ARTT, interprétation contre laquelle le SNEPAP-FSU n’a cessé de se battre. Avec le nouveau système envisagé, l’agent n’aurait aucune possibilité de prétendre à une RCT qui ferait suite à un crédit-temps généré sur une période quelconque.

Tout comme la récupération du crédit-temps limitée aux seules heures de travail effectuées le mois précédent, la récupération du crédit-temps limitée aux seules heures de travail effectuées sur trois mois constitue une escroquerie. Car le droit acquis figure dans la circulaire ARTT : l’annualisation du temps de travail avec possibilité de cumul de mois en mois. Il ne s’agit ni de mensualisation, ni de trimestrialisation. L’acharnement de la DAP à ne pas reconnaître son erreur d’interprétation, la conduit aujourd’hui à une démultiplication des

dispositifs qui aura une conséquence aussi prévisible qu’inquiétante : rendre absolument illisible pour les agents l’état de leurs droits horaires et donc réduire leur capacité à se défendre contre les abus de l’administration.

Le SNEPAP-FSU l’a très récemment réaffirmé à Madame la Directrice de l’Administration Pénitentiaire : nous n’acceptons pas plus le recul de nos droits tel qu’il s’organise depuis le déploiement d’Origine, que tel qu’il se profile avec les propositions examinées aujourd’hui en CTAP.

L’aménagement du temps de travail des agents des SPIP correspond à un équilibre entre contraintes professionnelles et contraintes personnelles, tout en consacrant un nécessaire degré d’autonomie et de souplesse d’organisation au profit des personnels exerçant dans ces services. Autant d’équilibres qui étaient trouvés à l’issue des négociations sur l’ARTT en 2001.

L’usine à gaz échafaudée par les organisations professionnelles du CTAP et la DAP est surprenante, dans la mesure où il suffit d’acter le report du crédit-temps, de mois en mois, dans la limite de 12h, comme le prévoit la circulaire de 2001. Le coup porté au principe même du régime d’horaires variables, avec les restrictions opérées sur l’utilisation des plages mobiles est stupéfiant. De même que la violation

flagrante du décret du 25 août 2000, lequel évoque pourtant expressément la possibilité d’être en débit-temps.

Le SNEPAP-FSU n’attend rien des organisations professionnelles qui ont superbement ignoré la problématique du temps de travail des personnels en SPIP, pour ne s’en saisir qu’à quelques mois des

élections professionnelles. Mais cela démontre, une fois encore, qu’il est plus que temps que le Comité technique national SPIP, qui reprendra vie à la sortie du prochain scrutin professionnel, permette à

l’ensemble des personnels d’insertion et de probation de se faire entendre !

Paris, le 28 mars 2014

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