Presse de faits divers : comment faire du buzz avec du vide !

Ces derniers jours, des articles ont fleuri dans les médias, faisant mention d’une enquête réalisée par le SPIP dans le cadre de “l’affaire Jubillar” et reprenant les propos qu’auraient tenu les avocats du mis en cause :

« La description de ce rapport est digne d’une agence immobilière, estiment les avocats de Cédric Jubillar, alors que ce type de mission doit d’abord vérifier la faisabilité de la pose d’un bracelet électronique, commentent, Mes Martin, Franck et Alary. Le rapport est en contradiction avec le premier et conforte ce que nous avions dit, à savoir que ce logement est habitable et ne présente aucun gravat. On ne peut que s’étonner que le SPIP s’inquiète du confort matériel de Cédric Jubillar quand dans le même temps il s’émeut bien peu des conditions de son incarcération à l’isolement ». Frédéric Abela – ladepeche.fr

En préambule, le SNEPAP-FSU rappelle que la procédure citée, actuellement entre les mains d’un juge d’instruction, est couverte par le sceau de la confidentialité. Le rapport du SPIP, pièce de la procédure, en est l’une des composantes. Il est à disposition des avocats des parties au procès, dans le respect du contradictoire… pas à disposition de la presse.

Il n’est pas inédit que les médias s’emparent de faits divers. Les “fuites” dont ils se nourrissent sont autant d’entorses au secret professionnel que le SNEPAP-FSU constate, déplore et dénonce ! Celles-ci ne sont en effet pas sans conséquence sur le quotidien des agents qui ne peuvent, dans ce climat de recherche permanente du buzz, travailler sereinement. A l’occasion de récentes et dramatiques affaires de féminicides, l’action du SPIP avait déjà été violemment questionnée par certains médias. Rappelons que les rapports d’enquête diligentées à ces occasions ont conclu au respect des missions et à l’intégrité des agents du SPIP.

Le SNEPAP-FSU dénonce l’emballement médiatique d’une certaine presse qui s’émeut d’un acte professionnel classique et objectif, rédigé à la demande de l’autorité judiciaire.

Il est inadmissible que nos professions soient sans cesse contraintes ou de se taire face à ces attaques, ou de se justifier.
Mais puisqu’il est nécessaire de faire preuve de pédagogie : l’enquête de faisabilité technique, c’est quoi ?

⇒ L’enquête s’inscrit dans la mission du SPIP d’aide à la décision des magistrats, pour les éclairer par des éléments objectifs.
⇒ Elle n’est pas circonscrite au seul constat d’un logement doté de l’électricité indispensable à la faisabilité technique de la surveillance électronique !

⇒ Elle doit permettre d’évaluer l’adéquation du logement aux conditions d’accueil et de vie quotidienne de la personne détenue : accord libre et éclairé des hébergeants, description précise des lieux, environnement et accessibilité du logement. De plus, les éléments apportés doivent permettre aux magistrats de mesurer l’impact de la sortie de l’intéressé dans ce lieu, sur la protection des victimes et les éventuels troubles à l’ordre public.

Conscients de leurs missions et des intérêts de tous, les SPIP oeuvrent à la construction de projets de sorties, adaptés, dans l’objectif de prévention de la récidive et du retour au sein de la société.

Quant au sarcasme relatif aux conditions de détention dont le SPIP ne se soucierait pas, pour le SNEPAP-FSU, il est outrageant et hors de propos. Rappelons que les quartiers d’isolement visent non seulement à garantir la sécurité des établissements pénitentiaires mais aussi à protéger les personnes détenues de la violence inhérente à la vie carcérale, a fortiori lorsqu’elles sont médiatisées.

Les arguties relayées ici dans les médias instrumentalisent l’opinion publique, laissant penser un manque de déontologie des agents du SPIP, et tentent grossièrement d’influer les décisions judiciaires comme elles marquent déjà scandaleusement de leur empreinte les décisions législatives.
La stratégie de la Défense, certainement obscurcie par sa connaissance, plus que partielle, du milieu pénitentiaire, adopte ici un procédé bien petit.

 

Pour le SNEPAP-FSU la remise en cause, par voie de presse,
de l’action et de l’intégrité du SPIP, qui intervient strictement dans le cadre de ses missions, provoque tant l’indignation que l’insécurisation des agents.
S’il est important que la société s’intéresse au fonctionnement de la justice,
cette dernière a une place consacrée.
Si on peut lui reprocher parfois ses délais d’instruction outranciers, il n’y a, pour autant, pas lieu qu’elle s’exerce dans les médias et autres réseaux sociaux.
Stop au sensationnalisme et aux caricatures ! Place au professionnalisme, par respect pour les victimes et les personnels du Ministère de la Justice.
Élever le débat ne devrait-il pas être le rôle de la presse ?

 

Paris, le 17/02/2023

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