[Région Rennes] DAVC : Il est urgent d’attendre
Depuis fort longtemps, constat était fait de la nécessité d’un outil d’évaluation
interne aux SPIP, harmonisé nationalement et destiné à améliorer la prise en
charge de PPSMJ par les CPIP.
En 2008 le SNEPAP-FSU s’est donc tout naturellement réjoui de la mise en
place par l’administration d’un groupe de réflexion réunissant des professionnels
des SPIP de notre région. Mais après plus d’un an de travail, de réflexion et de
propositions, la DAP n’a plus semblé s’intéresser à la poursuite de ce travail, et
ce malgré de multiples relances du SNEPAP-FSU.
Alors que la dernière version du document n’était ni aboutie, ni validée par ce
groupe et par une expérimentation effective, la nécessité d’afficher le plus
rapidement possible une réponse après l’affaire de Pornic a conduit la DAP à
présenter le DAVC comme La Solution, et le GDS à l’afficher comme Le Moyen
de résoudre le problème de la dangerosité.
Et malgré cet affichage, la DAP s’est désintéressée du contenu du DAVC, de
l’organisation des services qui devaient s’en suivre, et des besoins en personnels
nécessaires à sa mise en oeuvre. Elle a juste pris soin de pallier au point le plus
gênant, en informant enfin la CNIL de l’existence d’APPI et en attendant son
avis avant d’imposer le DAVC.
Les personnels qui s’étaient investis dans ce groupe se sentent aujourd’hui
profondément trahis et manipulés par la DAP qui a dénaturé leur réflexion en
diffusant un outil inintéressant dans sa forme, lourd et, comble de tromperie,
accessible à tous. Car en effet, un des postulats de base fixé par le groupe de
travail initial résidait bien dans la stricte confidentialité de cet outil, réservé aux
personnels d’Insertion et de Probation.
Le SNEPAP-FSU a toujours été favorable à une harmonisation des pratiques
professionnelles dans les SPIP, afin garantir au mieux une égalité de traitement
des justiciables sur le territoire français.
De ce fait, la création d’un outil d’évaluation de la situation de la personne
placée sous main de justice, au regard de l’infraction commise, avec pour objectif
une prise en charge adaptée à chacune était une bonne chose.
Mais le DAVC imposé par la DAP ne correspond en rien à ces objectifs !!
Le SNEPAP-FSU n’a eu depuis plus d’un an de cesse de s’opposer à cette mise en
place à marche forcée et sans garanties minimum de légalité.
Aujourd’hui, la mise en oeuvre du DAVC se heurte à bon nombre de problèmes :
→ La visibilité du document par toute personne habilitée à utiliser le
logiciel APPI, mise en question par l’avis de la CNIL du 21 juillet 2011, est très
inquiétante en termes de respect des libertés individuelles (particulièrement
celui de la vie privée), au sein même d’une institution pour laquelle le respect des
règles posées devrait être un préalable à toute action.
La CNIL a demandé que des précisions soient apportées « sur la nature des
données auxquelles devraient avoir accès les destinataires en fonction de leurs
attributions et souligné qu’il serait également utile de distinguer les personnes
ayant un accès en simple consultation au traitement des personnes ayant un
accès avec modification. »Elle invitait le « Ministère à définir plus strictement
encore les profils d’accès en fonction du besoin d’en connaître de chaque catégorie
de destinataires ». Non seulement les précisions n’ont pas été apportées, mais à
ce jour, toute personne ayant accès à APPI à accès au DAVC.
La CNIL a demandé à ce que le décret prévoie les situations particulières
conduisant à la mise à jour ou à l’effacement des données en cas de non lieu,
relaxe, acquittement. Le décret ne prévoit rien de tel…
La CNIL avait pris acte de l’engagement du Ministère, dans le cadre de
l’interconnexion entre APPI et d’autres fichiers (Cassiopée, Gide etc.), de ne pas
permettre la circulation des données de APPI à ces fichiers (l’inverse seul étant
prévu dans le projet initial) : or le décret ne le précisant pas, la transmission de
données est donc possible.
La traçabilité des consultations exigée par la CNIL, et promise par
l’administration, n’est à ce jour pas en vigueur.
En permettant l’accès au DAVC (et donc son interprétation, son exploitation,
voire son dévoiement) par d’autres professionnels que ceux du SPIP et en lui
donnant, de fait, la qualité de rapport, l’administration a donc complètement
dénaturé l’outil d’évaluation réclamé par les CPIP.
→ Alors que les notes de service exigent la mise en oeuvre du DAVC,
l’information des personnes sous main de justice imposées par les textes n’est pas
prévue par la DAP, et rarement envisagée dans les services.
→ Les temps impartis pour réaliser ce DAVC sont tout bonnement
irréalistes. Prétendre qu’une première évaluation puisse être réalisée dans les 3
mois de la saisine en milieu ouvert et dans le mois pour la détention, et pour tous
les types de mesures, est une véritable insulte envers les personnels. Comment peut-on envisager de tels délais tout en sachant que les carences humaines et
matérielles sur les SPIP sont de plus en plus criantes compte tenu de l’inflation
législative (le dernier né, le 741.1 est à ce titre un joyeux « souk » dans certains
services)
→ Le DAVC a initialement été pensé dans le cadre de services
pluridisciplinaires ; à ce jour, cette pluridisciplinarité n’est pas effective, les CPIP
porteront donc seuls et sans cette formation, la responsabilité du contenu du
DAVC. La formation soit disant dispensée aux personnels ne concerne que la
partie technique de l’utilisation de l’outil informatique et est réduite à la portion
congrue en ce qui concerne les conséquences de leurs écrits dans cette
application. Or, la REP 71 précise : « le personnel doit être formé à effectuer des
appréciations conformément aux présentes règles. Lorsque les systèmes
nationaux ont recours à des instruments d’appréciation, le personnel doit être
formé à comprendre la valeur potentielle et la limite de tels instruments, et à les
y utiliser pour étayer son appréciation professionnelle »
Exiger la mise en oeuvre du DAVC sans moyen supplémentaire dans un
tel contexte est irresponsable.
Pour rappel la Règle Européenne de Probation 29 édicte : « les effectifs des
services de probation doivent être suffisants pour qu’ils puissent assurer
pleinement leur mission. Le nombre de dossiers que chaque agent a à traiter doit
lui permettre de surveiller, guider et assister efficacement les auteurs d’infraction [… ]. Si la demande est excessive, il est de la responsabilité de la direction de
chercher des solutions et d’indiquer au personnel les tâches prioritaires ».
L’Administration a donc fait le choix de mettre en
oeuvre le DAVC dans la précipitation et au mépris des
garanties les plus élémentaires eu égard à l’utilisation
d’un tel dispositif.
Pour l’ensemble de ces raisons le
SNEPAP-FSU région Ouest appelle
l’ensemble des agents de la DISP
RENNES à boycotter le DAVC.