Assez d’annonces, des actes !

Le 5 juillet dernier, plus d’un an après sa nomination, Mme TAUBIRA, Garde des Sceaux, procédait à son premier déplacement dans un SPIP. Cette visite fut l’occasion d’annonces pour des services jusque là soigneusement évités et qui, ces derniers mois, voyaient défiler des déclarations toujours plus décalées avec la réalité. Les personnels des SPIP et leurs organisations représentatives, qui ne sont ni irresponsables ni ingrats, ont pris acte des engagements de la Garde des Sceaux. Mais la longue tradition des paroles sans lendemain, l’état réel des SPIP, le quotidien de nombre de services et de personnels, l’actualité estivale et les signaux contradictoires qui nous sont renvoyés depuis, nous obligent à une ultime mise en garde.

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Ressources humaines : la maison ne fait plus crédit !

L’annonce de la création de 450 emplois pour les SPIP répond insuffisamment à l’état de carence. Pour viser un ratio moyen de 40 dossiers par CPIP, objectif annoncé par le Premier Ministre, il faudrait doubler le corps. A moins, et c’est ce qui est sous-tendu dans certaines prises de position ministérielles, que ce ratio ne vise que les personnels chargés du suivi des futures personnes placées sous contrainte pénale. Cette distinction ne reposant sur aucune démarche construite et partagée, et conduisant au suivi priorisé de 15 à 25 000 personnes, estimation de la chancellerie, au détriment de plus de 225 000 autres, et d’une majorité de personnels qui continueront de crouler sous la charge, est inacceptable. En outre, la ventilation de ces emplois est à ce jour inconnue : les carences étant générales pour tous les corps évoluant dans les SPIP, comment un tel chiffre pourrait-il répondre aux besoins ? Si la volonté est réellement de placer les SPIP en première ligne de l’application de la future loi pénale, les ambitions peuvent d’ores et déjà être revues à la baisse.

La réalité, la voilà : les services sont asphyxiés. Il y a de plus en plus d’antennes où l’effectif moyen confié à un CPIP navigue entre 130 et 250 suivis ! Nous sommes bien loin de la moyenne arithmétique, distillée dans les médias, de 80 dossiers par agent… Plus encore, le traitement quotidien réservé aux personnels n’est plus supportable : qu’il s’agisse des personnels de surveillance employés à tout faire, des personnels administratifs écrasés par les tâches, de cadres soumis aux injonctions paradoxales de l’administration ; sans oublier les gestions hasardeuses des CAP et des situations des personnels non titulaires. Face à ce constat, inutile de claironner dans les médias que le suivi sera mieux assuré avec le nouveau projet de loi ! Ce que nos trois organisations réclament à cor et à cri, c’est une simplification drastique des procédures, pas un dispositif supplémentaire ; des missions et attributions clairement précisées ; des effectifs en personnel qui permettent un suivi effectif des PPSMJ ! Le recrutement annoncé ne sera pas suffisant. Les organigrammes de référence pour les SPIP, chantier que l’administration traîne comme un boulet depuis une décennie, doivent impérativement être établis.

Situation matérielle et budgétaire : des services en cessation de paiement !

De gels en sur-gels, des SPIP frôlent la banqueroute. Budget de fonctionnement 2013 par endroit épuisé dès le mois d’août ; crédits d’intervention sabrés au point que des partenaires et intervenants ne sont plus payés depuis des mois… ; accès des personnels à la formation continue sacrifié ; papier en rupture de stock, interdiction des envois en recommandé, rien ne va plus. Pour les enquêtes, visites à domicile, déplacement sur les permanences délocalisées, l’interdiction d’utiliser son véhicule personnel, faute de crédit pour les frais de déplacements, se heurte à l’insuffisance des véhicules de service !

Moyens d’intervention : des gestes forts !

L’argent dépensé pour la construction de nouvelles prisons agit comme une éponge sur les autres postes de dépense. Le budget consacré aux politiques d’intervention sociale dans leur ensemble est compressé ; dans certains établissements, des intervenants extérieurs, pour certains sans autre ressource, ne sont plus payés depuis près d’un an. L’objectif de réinsertion des publics en est la victime directe, puisqu’en la matière, c’est peu dire que nous sommes dépourvus de moyens. Les besoins sont immenses pour ce qui concerne le financement de places de placement à l’extérieur, d’hébergement, de dispositifs innovants, le soutien d’organismes d’accompagnement vers l’emploi ou la formation.

Formation des CPIP, le sacrifice d’une profession

La remise en cause de l’alternance par la concentration des savoirs théoriques sur la première année a porté atteinte à la qualité de la formation initiale, formation dont le contenu doit faire l’objet d’une profonde remise à plat. La pré-affectation des stagiaires sur des postes vacants à l’issue de la première année a fragilisé nombre de services, pour la plupart concentrés sur deux DISP en souffrance (répartition inégalitaire des stagiaires ; « turn over » des services qui voient les nouveaux titulaires fuir dès qu’ils en ont l’occasion ; charge disproportionnée pour les titulaires). En outre, ce système est préjudiciable à la qualité de l’apprentissage des futurs professionnels dont le nombre de dossiers confiés est supérieur aux standards de formation. Il est désormais temps de mettre fin à des dysfonctionnements unanimement dénoncés !

Les personnels n’ont que faire des paroles, ils attendent des actes. Il ne suffira pas de respecter les promesses déjà faites, il faudra aller plus loin. Nos organisations invitent les personnels à être attentifs à l’évolution d’une situation qui, une fois les feux de l’actualité relative à la future loi pénale éteints, pourrait ne plus se présenter avant plusieurs années : nous devons tous nous tenir prêts.

Paris, le 1er Octobre 2013

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